Histoire vaudoise, le Moyen Âge

Dès la fin de l’Antiquité, l’histoire du territoire formant l’actuel canton de Vaud a été intégrée dans certains récits, sans que l’on puisse évidemment parler d’histoire vaudoise au sens strict. Ce sont surtout des ecclésiastiques (l’évêque Marius d’Avenches, † 593, puis Conon d’Estavayer, le prévôt de la cathédrale de Lausanne, † 1244), qui donnent quelques éclairages dans une optique bien spécifique, celle de la continuité institutionnelle sur le siège épiscopal lausannois. Lausanne étant alors le centre d’un grand diocèse qui dépassait largement les frontières du pays de Vaud, celui-ci ne constitue pas le cadre de référence de cette histoire ecclésiastique.

 À partir de la fin du XIIIe siècle, les contours territoriaux du Pays de Vaud se précisent et on voit apparaître dans les textes des expressions telles que ‘patrie de Vaud’ ou ‘coutume de Vaud’. L’émergence de cette identité vaudoise ne s’accompagne pourtant pas d’une production historique. Le Pays de Vaud est alors un bailliage intégré dans le vaste comté (duché dès 1416) savoyard et c’est dans les chroniques rédigées à la cour de Savoie que l’on trouve les premiers éléments d’une histoire ‘vaudoise’. Rédigée vers 1417-1419 à la gloire de la dynastie, la Chronique de Savoie écrite par Jean d’Orville, dit Cabaret, présente l’arrivée de Pierre de Savoie dans le Pays de Vaud comme une héroïque conquête militaire, effectuée au détriment de la noblesse locale qui se soumit sans condition. Cette vision ne correspond pas à la réalité restituée par les documents d’archives mais elle reflète la tendance autoritaire de l’État princier savoyard du XVe siècle.

Il faut attendre le XVIe siècle pour que, à la faveur des bouleversements suscités par la Réforme et la conquête bernoise, surgissent enfin des récits autochtones, dont les Mémoires de Guillaume de Pierrefleur d’Orbe († 1580) sont l’exemple le plus développé. Même s’il ne prend pas le Pays de Vaud pour cadre de référence et reste focalisé sur la ville natale de son auteur, adversaire résolu de la Réforme, ce récit savoureux est l’un des premiers textes rédigés qui nous plonge au cœur de l’histoire du XVIe siècle vaudois.

Bernard Andenmatten

Bibliographie

Mémoires de Pierrefleur, éd. critique avec introd. et notes, Louis Junod, Lausanne, La Concorde, 1933.

Bernard Andenmatten, La Maison de Savoie et la noblesse vaudoise (XIIIe – XIVe s.) : supériorité féodale et autorité princière, Lausanne, Mémoires et Documents de la Société d’histoire de la Suisse romande IV/8, 2005, p. 17-20.

Laurent Ripart (éd.), Ecrire l’histoire, penser le pouvoir. Etats de Savoie, XVe – XVIe siècles, Chambéry, PU de Savoie, 2018.

Catherine Santschi, Les évêques de Lausanne et leurs historiens des origines au XVIIIe siècle : érudition et société, Lausanne, Mémoires et Documents de la Société d’histoire de la Suisse romande III/11, 1975.